Par Louis Thomas Federspiel | publié le 20-07-2023 à 11:27
À quand la fin des énergies fossiles dans le chauffage ?
Le sens de l’Histoire nous conduit à un abandon progressif des énergies fossiles dans toutes les activités humaines, à commencer par le transport et le chauffage. Cette transition radicale peut sembler lointaine, mais elle est bel et bien amorcée.

Soutenu par des aides publiques très avantageuses, le marché du remplacement des chaudières anciennes se porte très bien et tourne nettement en faveur des pompes à chaleur air/eau. C’est sans aucun doute le fioul qui connaît le déclin le plus évident. Depuis le 1er juillet 2022, il est même interdit d’installer une chaudière fioul neuve non compatible biofioul (BF30). De plus, pour les ménages qui se chauffent toujours au fioul domestique - ils sont encore 3 millions environ - l’addition est devenue salée au moment de faire le plein.
La fin du fioul, mais pas tout de suite…
Soyons précis : la réglementation actuelle dispose qu’aucun équipement neuf de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire ne peut désormais émettre plus de 300 g de CO par kWh. Ce seuil entraîne l’exclusion des chaudières fonctionnant au fioul et au charbon, mais permet tout de même l’usage de biocombustibles et de pompes à chaleur hybrides fonctionnant au fioul, et des dérogations sont prévues dans certains cas : en présence d’obstacles techniques ou réglementaires évidents (par exemple, lorsque l’espace extérieur ne permet pas l’installation d’une unité extérieure de pompe à chaleur) ou s’il n’existe pas de réseau de chaleur ou de gaz et que l’installation d’un équipement conforme à la réglementation exige un renforcement du réseau électrique. Pour encourager les propriétaires de vieilles chaudières fioul à moderniser leurs installations, par exemple en remplaçant leur brûleur par un modèle compatible avec le biofioul, les professionnels du secteur demandent des ajustements fiscaux. Ce combustible étant plus cher que le fioul domestique traditionnel, de telles mesures permettraient de réduire l’écart de prix entre les deux types de combustibles.
Le gaz également menacé
De son côté, la chaudière gaz est confrontée à de nouvelles menaces. Après avoir été interdite dans les maisons neuves par la réglementation environnementale RE2020 (et dans moins de deux ans dans les logements collectifs neufs), elle est également exclue des programmes d’incitation tels que le Coup de pouce chauffage et MaPrimeRénov’ depuis cette année. L’élimination progressive des chaudières gaz, similairement aux chaudières fioul, est sérieusement prise en considération par les organisations professionnelles qui ont uni leurs forces pour plaider en faveur du chauffage au gaz auprès des ministères et des députés.
Les énergies fossiles sont clairement ciblées par les autorités dans le contexte de la décarbonation du chauffage, mais si la suppression des chaudières fioul est déjà engagée, le défi est d’un autre niveau pour les chaudières gaz : environ 11 millions d’installations sont dénombrées en France ! Il y a un an, un représentant de la Direction générale de l’énergie et du climat, relavant du ministère de la Transition écologique, déclarait sans ambages : « Notre politique vise à éliminer le charbon, le pétrole et le gaz naturel pour parvenir à un mix énergétique totalement décarboné. » Il a également souligné que le conflit en Ukraine devait accélérer la sortie des énergies fossiles.
Le gaz conserve des partisans
Pascal
Housset, le président de l’UMGCCP (Union
des métiers du génie climatique, de la couverture et de la
plomberie),
a réagi en affirmant : « Plutôt
que d’interdire un produit ou une énergie, nous préférons tenir
un tout autre discours : comment décarboner intelligemment,
sans opposer les énergies ? Comment la filière peut
accompagner la transition énergétique, en sachant que l’on aura
besoin de toutes les énergies pour tenir les objectifs ? Pour
nous, le problème ne vient pas des chaudières, qui sont toutes déjà
compatibles gaz vert et qui pour beaucoup acceptent déjà un certain
pourcentage d’hydrogène. On compte à ce jour plus de 500
méthaniseurs qui produisent du gaz vert. L’objectif d’injecter
dans les réseaux 20 % de gaz vert à horizon 2030 a toutes les
raisons d’être tenu ».
Il met en garde contre une concertation qui se focaliserait
uniquement sur l’interdiction du gaz et souligne que l’annonce de
la fin du gaz serait une aubaine pour les éco-délinquants, comme on
peut le constater aujourd’hui avec les pompes à chaleur… (lire notre article sur les arnaques à l'installation de PAC)
En
dépit de ces réserves, les énergies fossiles sont condamnées à
reculer dans nos usages, non seulement en raison de contraintes
environnementales pressantes, de leur prix toujours plus élevé,
mais aussi – à terme – en raison de leur disponibilité
déclinante.